Why collaborate with patients ? 3ème sommet européen sur les crypto-infections – Dublin 2023
Le samedi 17 et dimanche 18 juin prochain, le 3ème sommet européen sur les crypto-infections, maladie de lyme et autres infections cachées, la persistance microbienne, a eu lieu à Dublin en Irlande. Les intervenants étaient des médecins et chercheurs venant de différents pays sur les maladies à tique comme Monica Embers, Christian Perronne ou Bob Bransfield.
Pour la première fois, une patiente-experte, Christèle Dumas-Gonnet, co-fondatrice du Collectif PReFacE et également membre du CA de France Lyme, était invitée à prendre la parole en tant que speaker pendant environ 30 minutes sur le sujet : « Pourquoi collaborer avec les patients dans les cas cliniques complexes comme la maladie de Lyme ? »
Il existe plusieurs autres appellations, notamment patient-ressource, patient-partenaire, pour définir ce rôle émergent dans le système de santé au sens large. Ces patients n’ont pas fait médecine, mais ils connaissent la maladie chronique et/ou invalidante de l’intérieur. Ils ont décidé de mettre leur expérience au profit d’autres malades et de plus en plus au service des professionnels de santé, mais aussi des instances de santé, politiques publiques, universités, hôpitaux etc… Ils ont en France l’obligation de se former pour développer de l’éducation thérapeutique du patient (ETP) grâce à une formation de 40h mais aussi au travers de formations spécifiques délivrées par des associations (France asso santé, l’UFPP (Union française des patients partenaires). Plus largement, les patients-experts sont incités à valider un diplôme universitaire (D.U.) ou une certification universitaire (C.U.) délivré au sein de plusieurs universités de médecine dont la Sorbonne, Aix-Marseille, Paris XIII, UPEC (Paris-Est-Créteil-Val de Marne), Metz-Nancy etc…
Qu’est-ce qu’un patient-expert ?
Le terme patient-expert est apparu dans les années 90 dans les pays anglo-saxons et a été repris en France dans les années 2000.
Expert du « vivre avec », le patient ainsi formé, peut contribuer notamment à co-construire et animer avec des soignants, des ateliers d’Éducation Thérapeutique, au profit des patients mais aussi investir des rôles tels qu’informer, conseiller, accompagner les patients atteints de pathologies chroniques.
L’Éducation Thérapeutique du Patient (E.T.P.) a pour but d’aider les personnes malades et leur entourage, à maintenir ou acquérir les compétences nécessaires pour mieux se prendre en charge, et mieux vivre avec leur maladie chronique.
Il est important de souligner que l’implication des patients dans le système de santé n’a rien de nouveau. Il faut remonter à la création des Alcooliques Anonymes en 1935, à Akron, Ohio pour découvrir les premiers effets de l’engagement patient, avec le résultat d’une rencontre entre Bill W., un agent de change de New York, et le Dr Bob S., un chirurgien. Tous deux alcooliques invétérés, ont été les premiers à mettre sur pied des groupes de soutien, qui se sont depuis développées dans le monde entier.
Mais c’est réellement avec l’épidémie de SIDA dans les années 80, que les patients vont être amenés à jouer un rôle de premier plan.
La lutte contre le SIDA a donné aux patients l’opportunité de devenir des acteurs actifs, non seulement par leurs revendications médicales et politiques, mais aussi par leur implication dans la recherche et la prévention.
Cela a conduit à l’époque à cette citation :
Les patients ne sont pas le problème, ils font partie de la solution.
C’est effectivement la meilleure définition de l’engagement des patients.
Pour la première fois, les médecins, confrontés à leur impuissance à sauver la vie des malades, ont dû apprendre à manier les informations de santé publiques et à être en relation avec les associations de patients.
Pour la première fois, il est devenu essentiel de chercher de nouvelles stratégies de prévention, de soins et d’accompagnement, avec et pour les patients.
Plus récemment, au Canada en 2020, une étude de la chercheuse Marie-Pascale Pomey a montré le rôle et l’importance des patients-experts dans l’élaboration des recommandations de bonnes pratiques sur la maladie de Lyme. Inclus dans les groupes de travail, les patients-experts ont fait l’unanimité auprès des experts et médecins qui composent habituellement ces groupes.
Quelques verbatims issus de cette étude :
« C’est certainement le projet qui m’a le plus appris dans ma carrière. » (un médecin du groupe)
« L’étude de cas illustre que l’inclusion des patients-experts dans le comité consultatif est un moyen de rassembler et d’intégrer des connaissances qui ne sont pas disponibles dans la littérature scientifique. » (Experts et médecins du groupe)
« Les patients-experts ont également servi de pont entre les représentants des associations de patients et l’équipe du projet Lyme, en étant capables de décrire le rôle de chacun et la complémentarité de leurs perspectives respectives. » (Experts et médecins du groupe)
Sur la base de tous les travaux menés ces dernières années, on peut définir ainsi l’impact de l’implication des patients dans le système de santé :
Pour les médecins
- Meilleure compréhension du point de vue du patient
- Améliorer la relation médecin/patient
- Développer une véritable collaboration avec les patients
- Réduire les malentendus et les tensions
- Développer une démarche d’accompagnement
- La mise en réseau
Pour les patients
- Meilleure récupération
- Augmentation de l’estime de soi
- Autonomisation
- Développer de nouvelles compétences
- Mieux comprendre le travail des soignants
- Moins d’hésitation à se confier aux médecins
- La mise en réseau
Les patients-experts aident les soignants à mieux comprendre les patients en général.
Certains patients-experts ou patients-coachs collaborent désormais avec des médecins pour accompagner des cas complexes de maladie de Lyme et les résultats sont très positifs.
Les travaux de Lennize Pereira Paulo et Catherine Tourette-Turgis montrent que les patients atteints de maladies chroniques accomplissent chaque jour un véritable travail pour se maintenir en vie et en bonne santé :
– autodiagnostic au quotidien : quel type de douleur ai-je ?
– auto-prescription : est-ce que je prends ou non un antalgique ?
– apprendre à réaliser des actions sur soi : injections, soins, assistance technique, etc.
– l’auto-influence : j’ai besoin d’accepter l’idée d’un nouveau traitement et d’y penser.
Etc….
Les patients sont des TRAVAILLEURS. Ils acquièrent des compétences techniques et relationnelles. C’est ce travail quotidien dans la maladie chronique qui permet au patient d’informer ultérieurement les médecins et les autres patients au début de la maladie.2016, Pereira-Paulo L. Les instruments du travail du malade : les « agir sur soi » dans les activités au service du maintien de soi en vie et en santé (thèse)
Après une formation qui leur permet d’acquérir de nombreux savoir et compétences, que ce soit sur le système de santé en général ou l’accompagnement des patients vers l’autonomisation, les patients-experts peuvent endosser de nombreux rôles :
– patient-intervenant
– patient-enseignant
– patient-coach
– patient-chercheur
– patient-consultant
– patient-défenseur des droits
– etc…
Au départ bénévole, la fonction de patient-expert évolue et de plus en plus de postes rémunérés s’ouvrent pour eux, leur offrant ainsi une reconnaissance du véritable travail mené auprès des patients et avec les professionnels de santé.
Vous pouvez retrouver l’ensemble de l’intervention sur le lien suivant :